Lettre à Mme Meyer (promenade architecturale)

Outre les esquisses axonométriques pour ses projets architecturaux, Le Corbusier met également au point une autre méthode dans les années 1920. Celle-ci permet avant tout à rendre l’architecture palpable. Plus tard, Le Corbusier appellera cette méthode la « promenade architecturale ». Le feuillet exposé ici est extrait d’une lettre adressée par Le Corbusier à sa cliente Madame Meyer. Il dessine pour elle les plans d’une villa à Neuilly-sur-Seine, aujourd’hui connue sous le nom de la Villa Meyer. Sur cette feuille ne figurent ni vue d’ensemble ni plan de coupe, ni même aucune donnée technique ou dimension. En fait, cela ne ressemble en rien à un dessin architectural, on dirait davantage une bande dessinée ou un story-board pour un film de cinéma. Le Corbusier a couché sur le papier toute une série de vues différentes de la villa Meyer. Chaque dessin est ainsi une esquisse en perspective d’une partie de la maison, de la vue extérieure jusqu’au toit. Dans le texte qui accompagne ces dessins, Le Corbusier guide sa cliente à travers l’ensemble des différentes pièces :

« le vestibule, grand, inondé de lumière, …. vestiaire, toilette s’y dissimulent. Du service on y atteint sans détour. Et si l’on monte d’un étage, c’est pour joindre le salon haut, hors de l’ombre des futaies, et donner de là-haut la magnifique vue sur les feuillages. Et voir davantage du ciel… »

En lisant les remarques de Le Corbusier, on comprend l’intention de cette promenade architecturale : il tente d’expliquer l’originalité de son esquisse. Mais surtout, cela doit permettre à la cliente de se faire une idée de l’effet dégagé par la maison. Les esquisses se transforment ainsi en un prolongement des événements spatiaux.

Bien souvent, Le Corbusier utilise à présent différents types d’esquisses à la fois: du plan d’ensemble technique à la promenade architecturale, en passant par les axonométries. Cela témoigne d’un changement d’attitude fondamentale de Le Corbusier vis-à-vis de l’architecture. Pour lui, cette dernière n’a plus pour fonction de réunir les différents éléments d’une construction en une unité harmonieuse. Elle doit davantage être un tout, une succession d’événements.