Paul Klee

Paul Klee s’est intéressé à la technique de la peinture sous verre comme peu d’artistes de son époque. Vassily Kandinsky, Gabriele Münter ou Heinrich Campendonk ont également manifesté de l’intérêt pour ce type de peinture, mais surtout pour la tradition populaire du sous-verre et non pour ses enjeux techniques. Entre 1905 et 1916, Klee a créé 64 peintures sous verre. Il a travaillé ce genre artistique de manière intense et a testé les nouvelles formes de représentation et les possibilités expressives qu’il offrait. Ce groupe d’œuvres exceptionnel englobe un large éventail de thèmes et de motifs, qui vont du paysage et des représentations d’animaux aux sujets satiriques, en passant par le portrait. Klee a aussi largement expérimenté ce nouveau support, le verre, en l’utilisant dans des œuvres réduites au clair-obscur ou dans des travaux à fond coloré. En mai 1905, il note dans son journal :

« Pour m’orienter vers une conception plus picturale, j’ai gratté une plaque de verre noircie avec une aiguille. L’idée m’en est venue en m’amusant et en faisant des essais sur une assiette en porcelaine. Le moyen n’est donc plus le trait noir, mais le blanc. L’énergie claire sur fond nocturne correspond parfaitement à la formule ‹ Que la lumière soit ›. Je glisse doucement dans le nouveau monde des tonalités. »

C’est d’abord l’inversion du positif et du négatif qui plaît à Klee : on ne voit plus apparaître une ligne noire sur un fond blanc ; il fait au contraire naître le dessin à partir du fond noir de l’encre de Chine, appliquée sur une plaque de verre. Le dessin surgit quand on grave des lignes dans cette couche de noir. Il peut aussi appliquer de l’aquarelle ou de l’encre de Chine directement sur la plaque, de sorte que la couleur se répand de manière aléatoire. L’artiste utilise surtout cette méthode pour les motifs paysagers. Dans de nombreuses représentations satiriques, il commence par appliquer une couche de blanc, dans laquelle il grave un dessin par grattage, puis ajoute des couleurs.

Dans les collections du Zentrum Paul Klee sont conservées 42 peintures sous verre de Klee. Ces œuvres, extrêmement fragiles, ont dernièrement été restaurées à grands frais et réencadrées comme l’avait souhaité Klee. Bon nombre d’entre elles ne pouvaient plus être exposées, car elles étaient endommagées : des bourrelets de peinture s’étaient formés, qui n’adhéraient plus au verre. Pour les travaux les plus fragilisés, la couche de peinture se détachait du support par endroits, si bien qu’ils ne pouvaient plus être entreposés qu’à plat et conservés, le verre orienté vers le bas. Une solution a pu être trouvée, en collaboration avec l’école supérieure des beaux-arts de Berne, pour parvenir à fixer sur le support en verre les couches de peinture qui s’en étaient détachées.