Anni Albers

Après 1963, Anni Albers se consacre de plus en plus à l’estampe et se détache du tissage. Vraisemblablement aussi parce qu’elle n’est plus physiquement en mesure d’assurer le travail pénible du métier à tisser. Aussi aventureuse qu’elle ait été dans le tissage, elle se montre tout aussi avide d’expériences, motivée et experte dans le maniement des techniques et des matériaux de l’estampe. En 1963, elle accompagne en effet son mari à l’atelier Tamarind Lithography Workshop, à Los Angeles, et en revient encouragée à s’exercer elle-même à l’estampe.

Ses premières œuvres présentent des nœuds et des lignes qui serpentent comme si les fils de ses créations textiles étaient passés de matériau à motif. Ce n’est que plus tard qu’Albers commence à travailler avec des abstractions géométriques en se concentrant sur des rubans, des méandres ou des triangles. Dans une interview, elle raconte :

« J’essayais de construire quelque chose à partir de points, de lignes, d’une structure formée de ces éléments fondamentaux et non pas la transposition d’une idée, d’une idée littéraire. »

Cette œuvre fait partie d’une série de gravures et d’aquatintes de 1976. La composition repose ici exclusivement sur des triangles dans trois variantes. Les triangles d’un noir intense sont ceux qui attirent le plus le regard, mais à côté se trouvent des triangles composés d’une multitude de points sans ligne de contour tandis qu’entre les triangles noirs et ceux formés de points d’autres triangles et losanges apparaissent dans les espaces vides. Pour Anni Albers, l’architecture des Zapotèques, qu’elle a découverte à Mitla, au Mexique, a été une source d’inspiration majeure pour cette structure en triangles. Une structure simple devient ainsi complexe, diverse et intéressante. Avec les triangles comme élément structurant, la parenté avec sa tenture murale de grand format pour le Camino Real ainsi qu’avec les œuvres intitulées Vicara Rug apparaît clairement.